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19 février 2008 2 19 /02 /février /2008 09:25

undefined Billet n° 09/2007



Sommaire :

La marine allemande déploie cinq batteries côtières autour de la Loire
La batterie sur rail de Batz-sur-Mer
Conception et fonctionnement du Grand Blockhaus
Du Débarquement à la Libération
La transformation en musée

La marine allemande déploie cinq batteries côtières autour de la Loire :

Formé en Allemagne en juin 1940, le 280e bataillon d’artillerie de la marine (Marine-Artillerie-Abteilung 280) est envoyé dans la région de Saint-Nazaire dès le mois suivant. Le rôle de ce bataillon est de protéger la région contre toute attaque maritime. Son secteur de défense comprend le port de Saint-Nazaire avec ses installations et surtout la future base sous-marine ainsi que les grandes plages où un débarquement est possible. Cette unité de défense côtière vient en fait à peine d’être constituée en Allemagne avec des personnels de réserve. Le moral du bataillon est bon à son arrivée. Après un certain temps la monotonie s’installera dans le service pour ces hommes dont la plupart, à leur arrivée, sont déjà âgés en moyenne de 30 à 45 ans.

Le bataillon va déployer ses cinq batteries au nord et au sud de l’estuaire :

Les deux premières batteries de la M.A.A. 280 sont installées au sud de la Loire sur les emplacements d’anciennes batteries côtières de la marine française, la première à la Pointe Saint-Gildas, la seconde au Pointeau. Les deux batteries sont remises en état et équipées chacune avec quatre vieux canons de 75 mm français. La batterie du Pointeau sera modernisée en 1943 par l’apport de canons allemands de 10,5 cm à chargement rapide. La troisième batterie est installée au nord de la Loire sur l’ancien emplacement de la marine française du Fort de l’Eve. Cette batterie lourde est équipée de quatre canons de 17 cm à chargement rapide. C’est la seule batterie du bataillon qui est réellement équipée de canons adaptés à l’emploi qui en est fait. Dans le courant de l’année 1942 le bataillon de marine côtière 280 est doté de deux batteries supplémentaires. Ces nouvelles batteries lourdes sont équipées chacune de deux canons sur rail français datant de la guerre 14-18 ! La 4e batterie s’installe au nord de la Loire à Batz-sur-Mer, la 5e au sud à Préfailles.

La batterie sur rail de Batz-sur-Mer :

 Batz-sur-Mer.jpg

La batterie sur rail de Batz-sur-Mer
Plan de la batterie sur rail de Batz-sur-Mer. Dessin Laurent Cochet

Afin de contrôler le chenal du nord de l'entrée de la Loire et de contrebattre tout gros bâtiment voulant soutenir un débarquement sur la plage de La Baule, les Allemands décident d'installer une batterie lourde sur voie ferrée à Batz-sur-Mer. C'est la 4e batterie de la M.A.A. 280 qui est envoyée pour former une batterie à Kermoisan, petit bourg de la commune de Batz-sur-Mer, situé à une vingtaine kilomètres à vol d'oiseau au nord de l'embouchure de la Loire. Les effectifs en hommes de la batterie sont les suivants début 1943 : 2 officiers, 24 sous-officiers et 164 hommes de troupe. Ils sont commandés depuis le 31 octobre 1941 par un simple lieutenant de réserve, Friedrich Schmidt, qui restera à ce poste jusqu’en mai 1945. Si le commandant reste dans le poste de direction du tir, l’autre officier, le sous-lieutenant Wilhelm Tiedemann, est toujours présent à côté des canons sur rail.

Fin 1941, les habitants du Croisic voient arriver à la gare deux grosses pièces d'artillerie lourde montées sur voie ferrée, suivies par cinq wagons de matériel et de munitions. Il s'agit de deux canons français de 240 mm Schneider Mle 1893-96 M « Colonies » qui proviennent du parc de réserve générale d'artillerie de l'armée française. Saisis par l'armée allemande à l'armistice en 1940, ils ont été emportés en Allemagne pour être testés avant d’être remis en service sur l’Atlantique. Dès leur arrivée fin 1941, les soldats de la 4e batterie s’installent autour du Moulin de Kermoisan où une dizaine de baraquements en bois sont construits, principalement pour le logement. L’Organisation Todt va ériger un véritable camp retranché protégé par un double réseau de barbelés entre lesquels des mines sont posées. Au milieu de ce camp deux aires de tir pour les canons sur rail sont raccordées directement à la voie ferrée Le Croisic - Saint-Nazaire. La batterie est située à environ 500 mètres à l'intérieur des terres, ce qui la rend invisible de la mer en cas de duel avec d’éventuels navires. Le meilleur tir est obtenu à 18 km de distance. Le premier problème de ces vieux canons qui peuvent tirer très loin est la précision. En cas de tir contre un objectif marin, les obus peuvent tomber de manière très dispersée à plus de cent mètres autour de la cible ! Malgré de nombreux essais sur les poudres employées lors des tirs, les impacts resteront toujours relativement dispersés pour l’utilisation qui devait en être faite. En plus de cela la cadence de tir d'un coup toutes les quatre minutes est très lente. Pour ces deux raisons l’emploi de ces vieux canons français est presque totalement inefficace contre un but marin mobile ! Ils sont surtout là pour avoir un effet dissuasif. Les canons et leurs servants vont être protégés des éclats d’obus par un parapet bétonné semi-circulaire. Six bunkers de stockage de munitions sont construits à côté de chaque position de tir.

 canons_sur_rail.jpg

L'un des deux canons sur rail de la batterie de Batz-sur-Mer dans son encuvement bétonné. Ces canons d'origine française avaient servi pendant la guerre de 14-18 avant d'être saisis par les Allemands en 1940. Coll. BA

A côté des vieux sous-officiers spécialistes, de nombreux artilleurs de marine sont de très jeunes garçons dont le principal souci est de ne pas se faire remarquer pour éviter l'envoi sur un front moins calme en représailles. Ils seront néanmoins régulièrement sollicités pour rejoindre l’arme sous-marine. Pendant ces années de guerre la vie quotidienne se déroule paisiblement pour les artilleurs de la batterie qui fréquentent les nombreux cafés de Batz-sur-Mer et de Kermoisan. La vie journalière des artilleurs se borne à effectuer une surveillance de jour comme de nuit, à édifier des abris pour stocker une partie des munitions, à effectuer les tâches ménagères dans les baraquements où ils logent, à entretenir les canons et surtout à s’entraîner à leur maniement. Après le raid britannique sur Saint-Nazaire la région est encore plus fortifiée et la batterie de Kermoisan est pressentie pour devenir une batterie d'importance capitale, elle doit recevoir quatre nouveaux canons de 305 mm pouvant tirer jusqu'à 51 km !

Conception et fonctionnement du Grand Blockhaus :

type_S_414.jpg
 
Poste de Direction de Tir type S 414 à 5 niveaux
Vue arrière du blockhaus camouflé en villa par l'adjonction d'un faux toit en bois et la peinture de 31 fenêtres en trompe l'œil. A quelques dizaines de mètres le camouflage est déjà trompeur. Coll. Yves Poupinot

Pour diriger le tir des canons et contrôler le trafic maritime entre Belle-île-en-Mer et Noirmoutier, la construction d'un Poste de Direction du Tir lourd type S 414 est programmée pour la fin de l'année 1942. Il sera installé sur le promontoire rocheux de la Dilane, à 16 mètres au-dessus du niveau de la mer. Le cinquième niveau hébergeant le télémètre sera ainsi à près de 30 mètres de haut. La construction du gros œuvre commence le 22 octobre 1942 pour s'achever avec le camouflage le 8 février 1943. Les premiers travailleurs qui mettent en place le squelette métallique du bunker avec 125 tonnes de fer sont des ouvriers Nord-Africains, stationnés au Camp Africain II de la Salinière au Pouliguen. Ils vont être relayés par une centaine d’ouvriers travaillant pour deux entreprises du bâtiment allemandes, Zollner et Polansky, en contrat avec l’Organisation Todt. Il y a un ouvrier français pour un ouvrier allemand, en général un homme plutôt âgé, mais pas de surveillants. Il leur faudra pas moins de 27 heures pour couler le béton liquide en trois étapes successives ! Auparavant une cinquantaine de menuisiers avaient travaillé pendant plusieurs semaines pour coffrer avec du bois l’ensemble du squelette métallique du bâtiment. Pendant le mois de mars et au début avril 1943 de jeunes français requis du Service du Travail Obligatoire et des entrepreneurs locaux payés par l'O.T. réalisent les travaux de finition comme le carrelage, la plomberie, l’électricité, l’habillage des murs avec du lambris... Logés au Pouliguen à l’ancien camp africain, les jeunes français du S.T.O. sont amenés tous les jours en camion sur leur lieu de travail, sauf le dimanche. Cet ouvrage de 25 mètres de long sur une hauteur maximale de 17 mètres a nécessité 1800 m3 de béton, ce qui représente 300 camions toupies de 6 m3 ! Son espace intérieur est de 285 m², les murs donnant sur l’extérieur et les plafonds ont partout deux mètres d'épaisseur.
Presque seul sur la lande et posé sur un promontoire rocheux, le blockhaus est très visible. Il est d'abord à sa livraison début 1943 défendu par un petit canon anti-aérien de 20 mm placé sur son toit, puis en février 1943 camouflé en maison. Ce camouflage en grosse villa est effectué par de jeunes allemands qui effectuent leur service du travail pendant trois mois au sein de la 6e Arbeitsabteilung de l'Arbeitstruppe 304 (R.A.D. Abteilung 6/304), unité formée à Burtenbach en Bavière. Un double faux toit est construit ainsi qu'un mur d'angle en briques pour cacher, côté mer, les faces anguleuses du blockhaus. Pour finir de lui donner une allure de grosse villa ils vont peindre trente et une fausses fenêtres en trompe-l'œil sur toutes les faces, ainsi que des fausses briques sur les angles et au raz du sol. Pour la finition, des rambardes sont ajoutées sur l’escalier d’accès et des faux balcons sont mis en place devant les visières, elles-mêmes surmontées de poutres en bois.


Le PDT est constitué de 5 niveaux différents ayant des tâches spécifiques :
- Le sous-sol abrite la partie vie avec trois chambrées contenant 21 lits pour la troupe et les sous-officiers, une salle de ventilation, une salle des machines avec un groupe électrogène, la chaufferie qui alimente les radiateurs répartis dans tout le bâtiment ainsi que deux petites pièces pouvant servir pour une armurerie, une petite infirmerie ou le stockage de pièces détachées ;
- Le rez-de-chaussée abrite principalement la salle d'exploitation et de tracé calculant les coordonnées du but à atteindre ainsi qu'une salle de transmission, la chambre de l'officier de quart, les blocs sanitaires ainsi qu'une très large entrée protégée par deux créneaux de défense ;
- Au niveau supérieur du rez-de-chaussée que l'on atteint par un petit escalier, un premier poste d'observation muni d'une lunette goniométrique permet de calculer l’azimut magnétique d’un objectif en mer, c’est à dire son angle par rapport au nord magnétique (boussole) ;
- On accède à la deuxième visière d'observation par une échelle métallique. Un deuxième poste d'observation plus vaste est mis en place. Il peut héberger deux observateurs munis de jumelles d’approche et un appareil très moderne, le correcteur de parallaxe. Compte tenu de la distance assez grande entre les canons sur rail et le PDT, ce correcteur de parallaxe permet de corriger les indications de gisement ;
- Le dernier niveau, à 28 mètres au dessus de la mer, est équipé d'un grand télémètre de quatre mètres d’origine française. Il donne avec précision la distance d'un navire croisant au large.

Le blockhaus est occupé par 20 soldats et le chef de batterie. Pour assurer le fonctionnement technique d'un tel ouvrage, il faut au moins un officier de tir, un observateur principal, un observateur auxiliaire, un chronométreur, un technicien au télémètre et un homme pour effectuer les corrections de parallaxe. Les marins effectuent un système de roulement sur place pour garantir une surveillance de jour comme de nuit. S’ils peuvent se reposer dans l’une des trois chambrées dans le sous-sol du bâtiment, en dehors des alertes ils sont cantonnés à l’extérieur du bunker. Ils logent avec les servants des canons anti-aériens qui assurent la défense du PDT dans plusieurs villas réquisitionnées et dans trois baraquements construits à l’intérieur de l’enceinte clôturée. Le commandant du blockhaus, pour sa part, habite la grande villa « Ty Brao » qui domine la plage du Derwin, à quelques centaines de mètres du PDT.

A cause de la présence permanente de troupes dans le bâtiment, tout est prévu pour le confort des hommes : les chambres sont chauffées par des radiateurs, une partie du sol est carrelé tandis que certains murs sont recouverts de lambris. Deux pièces sont équipées de toilettes et de lavabos avec l’eau courante, ce qui est rare à cette époque. La première est utilisée par les hommes de troupe, la deuxième qui sert aussi de poste de surveillance de l'entrée est réservée aux sous-officiers et au commandant. L'eau usée est évacuée par des conduits directement vers la mer. Les portes étanches ainsi que l'air filtré qui circule dans le blockhaus permettent aux soldats de vivre en autarcie, même en cas d'attaque par les gaz de combat. Avec une réserve d'eau et de nourriture ainsi qu’une infirmerie, le blockhaus est autonome pour tenir plusieurs jours en situation de combat. Son mobilier en bois, traité contre le feu, est calculé pour prendre le moins de place possible. Les tables et les tabourets sont pliants. Les lits tubulaires, d'un modèle proche de ceux utilisés sur les bateaux, peuvent se rabattre contre les murs.

Pour contrer toute attaque aérienne, le PDT est protégé à partir de la mi-43 par six canons français anti-aériens de 75 mm placés en encuvements dans un rayon de 150 mètres autour de lui, trois de chaque côté. Deux projecteurs de 60 et 150 cm peuvent aussi entrer en action en cas d’attaque nocturne. Enfin, pour une attaque rapprochée d’un chasseur par exemple, deux canons de 20 mm sont installés dans des encuvements rectangulaires de chaque côté de la route. Contre une attaque maritime le blockhaus est protégé côté mer par une petite falaise de plus de dix mètres de haut ainsi que par une rangée de barbelés et de chevaux de frise. Son accès arrière, côté terre, est protégé par cinq Tobrouk pour mitrailleuse ainsi que par une casemate bétonnée construite début 1944 pour abriter un canon de campagne de 75 mm. La route côtière qui mène au PDT est barrée et contrôlée de chaque côté. Son enceinte de protection, à l'intérieur de laquelle les quelques villas en place sont réquisitionnées, englobe les projecteurs, les encuvements anti-aériens et les défenses arrières.

Du Débarquement à la Libération :

Au moment du Débarquement en juin 1944 les canons de 30,5 cm sont encore en cours d'usinage en Allemagne, ils ne seront jamais livrés à Batz-sur-Mer. Les artilleurs de marine apprennent par la radio et les journaux ce qu'ils appellent « l'invasion » en Normandie. Ils suivent début août 1944 l'irrésistible percée de Patton en Bretagne... Quand ils se retrouvent à la mi-août encerclés dans la Poche de Saint-Nazaire, le front le plus proche, au-delà de la Vilaine, est encore à une trentaine de kilomètres de la batterie ! Le danger maintenant ne vient plus de la mer mais de l'arrière. La présence des deux canons de 24 cm à Kermoisan n'étant plus nécessaire, une des deux pièces sur voie ferrée est détachée au commandant de l'artillerie de la forteresse. Profitant du fait que les voies ferrées dans la Poche sont toujours intactes, la pièce sur rail va y circuler et jouer un rôle dans les combats qui s'y déroulent. La nouvelle base de repli du canon est le tunnel de Pontchâteau, situé dans la carrière de Grénébo. Des emplacements de tir lui sont aménagés à Campbon et Besné, le canon peut aussi tirer à partir de la sortie de la gare de Savenay. C’est d’ailleurs là qu’il sera retrouvé à la Libération. La pièce d'origine française aura bombardé les lignes françaises et américaines qui contiennent la Poche jusqu'au 6 mai 1945. Historiquement, ce canon sur rail est le dernier canon de l’artillerie lourde sur voie ferrée française à avoir tiré pendant la deuxième guerre ! Entre le 8 mai 1945, date de la signature de la reddition de la poche de Saint-Nazaire, et le 11 mai 1945, jour de l'entrée des troupes alliées dans la Poche, les marins de la 4. /M.A.A. 280 cantonnés à Batz-sur-Mer prennent la direction de leur camp de prisonniers, le parc pionnier situé près de la gare.

Tandis que le bourg de Batz-sur-Mer est libéré, le Poste de Direction de Tir est pris en charge par les soldats français du 4e Régiment de Fusiliers Marins qui retirent ce qu'ils peuvent utiliser, notamment les six canons de D.C.A. français de 75 mm. Après leur départ, le blockhaus est pillé par la population civile qui récupère tout ce qui peut être utile : mobilier, tapis, boiseries, électricité, plomberie, rampes d'escalier... Tout ce qui ne peut être emporté sera détruit, seul le coffre-fort en béton de près de 300 kilos qui était au sous-sol reste en place. Dès le 12 mai 1945, le télémètre français de 4 mètres est abîmé, la population met le toit en bois factice par terre pour récupérer les matériaux qui le composent. Dans les mois qui suivent des prisonniers allemands ainsi que des munitions sont gardés dans le PDT par les fusiliers marins du 4e R.F.M. Sous le contrôle de cadres français, jusqu'en octobre 1945, les prisonniers allemands démantèlent toutes les batteries. Les matériels récupérés sont regroupés à la gare de La Baule avant de partir vers des centres de stockage. 1500 prisonniers allemands, conformément aux prescriptions du protocole de la reddition de la Poche, effectuent aussi le déminage de la région.

La transformation en musée :

L'ancien Poste de Direction du Tir de Batz-sur-Mer, vidé de tout son contenu, est abandonné à la fin de la guerre. De 1951 à 1953 il est habité par une famille de réfugiés de Saint-Nazaire, puis il se retrouve de nouveau vide. Visible à des kilomètres, le blockhaus devient un lieu de visite pour les touristes qui viennent sur la côte. A la fin des années cinquante, le PDT est mis en vente par le propriétaire du terrain. Un panneau "A vendre" y est apposé. La marine Nationale s'y intéresse et utilise son droit de préemption pour l'acheter en 1958. Elle pourrait éventuellement l'utiliser comme sémaphore ou pour installer un radar. En fait il ne sera jamais occupé par la marine française ni restauré. Une porte vite installée sera vite détruite et le bâtiment est de nouveau ouvert à tout vent. Des ferrailleurs démontent plusieurs portes blindées pour les vendre au poids du métal puis le télémètre disparaît à son tour. La mairie de Batz-sur-Mer finit par murer le bâtiment dans les années 70 pour éviter des accidents. Des villas sont construites tout autour et leurs propriétaires arrivent à faire pousser des arbres sur cette côte sauvage balayée par le vent et les tempêtes. Au début des années 90 le PDT qui disparaît sous le lierre n'est presque plus visible de la route. Sa dalle supérieure de 40 tonnes menace de s'effondrer sur ses quatre piliers métalliques diminués de moitié par la rouille… les pompiers du Pouliguen viennent encore l'été, quand le sous-sol n'est pas trop inondé, pour y faire des exercices incendie… les graffitis ont recouverts les murs blancs et les plafonds. Les quelques portes qui subsistent sont bloquées par les gravats et la rouille…

A la fin de l'été 1994, mon frère Marc et moi décidons de restaurer le site et de le transformer en musée. Originaires de Chantilly dans l'Oise, nos parcours scolaires (école d'ingénieur à Paris pour ma part et école de commerce à Bordeaux pour mon frère) ne nous avaient pas tellement préparé à cette expérience. Mais notre volonté d'aboutir et la passion de l'histoire qui nous animait depuis notre plus jeune âge ont permis de surmonter les obstacles. Après plus de deux ans et demi de négociations administratives et six mois de travaux, le musée ouvre enfin ses portes le 1er juillet 1997. Il aura fallu évacuer près de 10 tonnes de gravats, utiliser plus de 8 tonnes de sable pour nettoyer les murs intérieurs, les portes et les plafonds ainsi que 650 kilos de peinture pour lui redonner une nouvelle jeunesse. Le musée est entièrement privé et n'a bénéficié d'aucune subvention de l'Etat. Il ne vit que grâce aux entrées des visiteurs qui ont dépassé le nombre de 300 000 en 10 ans. Le bâtiment est sauvé, et de ruine devient lieu de mémoire et site touristique. Il sert aussi de support pédagogique aux écoles et lycées désireux de faire connaître l'histoire locale. En quelques années nous avons collecté des centaines de témoignages et sauvegardé plus de 8 000 documents et photos d'époque sur la région pendant le dernier conflit mondial.

Autres lieux de mémoire à découvrir dans la région :
Chateaubriant : la stèle commémorative des 27 otages fusillés (22 octobre 1941) dans la carrière de la Sablière ;
Saint-Nazaire : la base sous-marine et le monument du commando britannique ;
La Baule – Escoublac : le cimetière anglais ;
Vestiges du Mur de l'Atlantique mis en valeur : la batterie allemande de la Pointe du Halguen à Pénestin (56), du Pointeau au sud de St-Brévin et de la Pointe St-Gildas à Préfailles ;
Saffré : le monument à la mémoire du maquis attaqué le 27 juin 1944 ;
Saint-Marcel – Malestroit (56) : le Musée de la Résistance Bretonne ;
Cordemais : la plaque commémorative apposée sur la maison devant laquelle fut signée la reddition de la poche allemande le 8 mai 1945 ;
Bouvron : le monument rappelant la cérémonie de reddition de la poche du 11 mai 1945 ;
La Sicaudais : le monument des troupes françaises pour la partie sud de la Poche ;
Pornichet : le cimetière allemand de Saint-Sébastien.

Le conservateur Luc BRAEUER

Bibliographie :
Autres ouvrages de Luc Braeuer : La Baule 1939-1945 (1998), La Poche au Pays-de-Retz (1999), L'incroyable histoire de la Poche de Saint-Nazaire (2000), La Base sous-marine de Saint-Nazaire (2001), Forteresse Saint-Nazaire, la marine allemande face aux Alliés (2002), Raid sur Saint-Nazaire, Opération Chariot (2003), Saint-Nazaire 39-40 (2004), U-Boote ! Saint-Nazaire (2006).

Informations pratiques :

Le Grand Blockhaus, Musée de la Poche de Saint-Nazaire
Côte sauvage 44740 Batz-sur-Mer
Tél. / Fax 02 40 23 88 29
E-Mail : grand-blockhaus@wanadoo.fr
Site : www.grand-blockhaus.com
Ouvert : vacances scolaires de février et du 1er avril au 11 novembre tous les jours de 10 à 19h.

Grand_Blockhaus.jpg

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